Vous écriviez pour les adolescents, mais Opération Balerina s’adresse à un public plus âgé.
C’est vrai, j’écrivais pour l’âge adolescent (+14). Il est certain que mes histoires plaisent bien au-delà et particulièrement à ceux qui sont restés scouts dans l’âme. Pour Opération Balerina, j’ai voulu m’adresser aux grands adolescents et jeunes adultes (+17), je quitte les camps scouts, mais le héros a été scout, ce qui explique plusieurs comportements. Ici Kévin est le héros du « bouquet du Rodia », il n’a plus 17 mais 22 ans et se trouve confronté à des situations d’adulte, nouvelles pour lui : université, monde du travail, émois amoureux.
Vous savez capter l’attention du lecteur, mais cherchez-vous aussi à livrer un enseignement par vos romans ?
Un jeune esprit peut être profondément touché par des romans. J’ai été moi-même marqué par les romans scouts de mon époque, exaltant l’honneur, la fidélité et la fraternité. Je crois qu’il est plus efficace de former un jeune que de corriger un adulte. De nombreux adultes achètent et lisent des ouvrages très intéressants expliquant que tout va mal et pourquoi. Souvent, ces mêmes adultes laissent les jeunes se construire seuls. Tout en écrivant ce que j’aime, j’essaye de proposer une certaine réponse aux parents soucieux de véritable éducation. Mes héros font face à des situations réelles que rencontreront nos enfants. Ils réagissent, mais pas toujours comme le devrait un chrétien, d’où des complications et des rebondissements. À chaque fois, le bon chemin est clairement indiqué, par le chef, par l’aumônier ou par les parents.
Souvent l’intrigue trouve son origine dans l’Histoire. C’est l’occasion d’expliquer de manière accessible des pages d’Histoire souvent difficiles. Ainsi nos jeunes peuvent découvrir la révolte des Camisards dans les Cévennes ; l’occupation, la résistance et les Maquis ; la Grande Guerre et Verdun, la Finlande pendant la seconde guerre ; l’Histoire des Pays Baltes.
Votre roman comporte le récit de manipulations informatiques qui m’ont paru complexes… mais peut-être est-ce une question de formation et de génération ?
« Pousse-toi Papa, je te montre ». Les jeunes sont nés avec ces technologies et y naviguent avec une aisance qu’ignorent même les plus doués d’entre nous. Nous ne sommes pas formatés comme eux. Les opérations sur ordi qui apparaissent dans ce roman et que j’ai simplifiées au maximum sont à la portée de tous les jeunes. Ceux qui ne suivraient pas ont du souci à se faire pour leur avenir.
Votre héros se livre à des intrusions dans les boîtes courriel et des systèmes informatiques. Est-ce un exemple à donner ?
C’est là une conduite peccamineuse et illégale qui peut mener très loin. Ces intrusions sont insignifiantes au début mais elles deviennent plus sérieuses au cours de l’intrigue. Nous avons aussi là le comportement, typiquement masculin, d’un jeune énergique qui veut absolument un résultat. À la fin les choses vont beaucoup plus loin. À un moment, il y a des conséquences, une prise de conscience. Le bien et le mal sont alors clairement énoncés et il y a réparation.
Kévin se montre assez dur et brutal avec l’incroyante Qétura. Partagez-vous ce comportement ?
Kévin est un converti. Comme c’est souvent le cas, par l’absence d’exemple de ses parents ou de son entourage, il n’a pas bénéficié de l’enseignement de mise en pratique de l’Evangile sur le terrain de la vie. Comme beaucoup de convertis, Kévin est souvent manichéen, excessif et fougueux. Il possède la vérité et tant pis pour les autres qui ne veulent pas suivre. Son zèle est manifeste mais parfois brutal et méprisant. J’ai remarqué que ce zèle encourt la réprobation des chrétiens de vieille souche mais reste assez bien reçu par les incroyants en quête de vérité, comme Qétura. Je dois reconnaître que cette méthode « remède de cheval » donne parfois des résultats étonnants mais elle ne peut être appliquée à tous sans risquer de créer beaucoup plus de mal que de bien.
Les anges gardiens sont de la partie. Sont-ils pour vous des personnages à part entière ?
C’est dans le catéchisme : les anges gardiens existent, ils agissent dans notre vie. Nous ne les voyons pas mais lorsqu’ils s’occupent de nous, leur action est manifeste. Ils comprennent les situations mais ne lisent pas nos pensées, il faut leur parler explicitement si on a besoin d’eux. Chaque pays (même le plus petit ou le plus inhumain) est protégé par un ange gardien. Alors oui, ils agissent de temps en temps dans mes romans car la vie est une succession de fatalités ou de coïncidences pour les incroyants mais pas pour le peuple de Dieu.
Vous avez de beaux passages sur l’âme russe. Connaissez-vous bien ce pays ?
Lorsque j’ai écrit Opération Balerina, je connaissais la Russie par de nombreuses lectures mais l’une de mes grandes filles m’a dit : « J’aime beaucoup ce que tu écris: l’Estonie, les Pays Baltes, les ferries… c’est parfait, mais ça ce voit que tu n’es pas allé à Saint-Pétersbourg ». Aussitôt nous avons programmé une mission à Saint-Pétersbourg (des vacances spéciales). J’ai livré nos impressions de voyage dans un article pour Présent et ce que J’ai découvert m’a donné envie d’en savoir plus. Depuis, je m’intéresse à tout ce qui touche à la Russie, son économie, sa diplomatie, ses engagements, ses projets, ses coopérations, ses immenses étendues, ses peuples… Le foisonnement d’informations sur le net et les mappemondes virtuelles sont des outils de connaissance extraordinaires. Je découvre que, toutes proportions gardées, la Russie d’aujourd’hui est en train de devenir ce que la France aurait dû être si elle avait su digérer 1789. Grâce à ces récentes connaissances, je suis sur une nouvelle histoire (+17ans), qui se passera dans l’Oural Polaire, on y retrouvera Ivan et Macha ainsi qu’une nouvelle héroïne française.