Les précautions pour le feu

Par Lama

Chaque année, au cours des activités et des camps, plusieurs unités se rendent responsables de départs de feu. La plupart du temps tout se termine bien, mais ce ne sera pas toujours le cas; un jour se produira un véritable drame. La seule façon d’éviter un tel drame est que les scouts et guides ne provoquent plus jamais de départ de feu. Lors de visites de camp, quelque soit le mouvement de scoutisme, nous nous apercevons de manière indiscutable  que peu d’éclaireurs et même de chefs connaissent les précautions à prendre lorsqu’ils allument un feu (bivouac, cuisine, veillée…) et que surtout, quasiment personne ne sait éteindre efficacement son feu avant de quitter les lieux.

Comment la forêt prend-elle feu ?

Il existe plusieurs façons de mettre le feu à la forêt. Nous allons toutes les passer en revue et nous examinerons la façon de s’en prémunir.

Transmission directe de la flamme

La patrouille a fait un feu sur un sol d’herbes sèches, de feuilles mortes sèches ou de fougères. Le feu marche bien et un brandon roule ou tombe hors du feu et enflamme l’herbe, les feuilles mortes ou les fougères par contact direct de la flamme ou de la chaleur (un brandon est à 800-900°C en moyenne).
La première règle à observer est de totalement dégager l’aire où va se placer le feu. On ne lésine pas, on retire tout ce qui est susceptible de brûler sur un rayon de 1,50 mètre autour du feu. Il faut quasiment mettre la terre à nu.
Tout de suite on comprend qu’il faut avoir sa pelle-bêche.
Ensuite, il faut regarder au-dessus du feu, il faut que les premières branches avec des feuilles se placent au moins à 3 mètres au-dessus d’un petit feu, bien sûr, il est hors de question d’un feu de veillée. S’il y a des branches, il est préférable de les couper. En revanche, il ne faut jamais faire du feu sous un résineux.

Transmission indirecte de la flamme

La patrouille a fait un feu sur une aire qui a été bien dégagée. Le feu marche bien et de temps en temps s’en échappent des étincelles. La plupart vont s’éteindre tout de suite mais il peut arriver que certaines survivent. Le phénomène devient critique en cas de vent violent qui attise le feu et emporte au loin les escarbilles.
Si cela arrive dans une forêt de printemps gorgée de sève, il n’y a guère de risque. Mais si cela se passe dans une forêt d’hiver tapissée de fougères sèches, c’est une autre histoire.
Il faut donc toujours penser qu’une escarbille peut aller voler un peu plus loin et se déposer dans une zone qui ne demande qu’à s’enflammer. Ainsi, il était courant qu’au temps des locomotives, les escarbilles rejetées par le foyer retombent sur les herbes sèches des remblais et les enflamment.
Imaginons maintenant que le novice jette un emballage papier sur le feu. Le papier s’enflamme et comme les cendres produites sont assez légères, elles se trouvent soulevées par le courant d’air brûlant et vont voler plus loin. Si elles ne sont pas éteintes en retombant, elles risquent d’enflammer herbes, fougères et brindilles sèches.

Alors que faire ? Très simple, ne pas allumer de feu dans ces zones à risque ou pendant les périodes à risque (la période des fougères sèches par exemple).
Ensuite, ne rien faire brûler qui soit susceptible de s’envoler. En outre, si on remarque qu’une essence de bois fait des étincelles ou « pète » alors ne plus en charger le feu.
Enfin, il ne faut allumer que de petits feux. Lorsqu’on est en raid, en explo ou en jeu, pas la peine de faire de grandes flambées pour se faire repérer de loin.

Le rayonnement

La chaleur se communique très bien par rayonnement. Exemple : le troisième fait sécher son blouson ou son anorak à une certaine distance du feu. Comme il pense que la distance est raisonnable, il ne le surveille pas. Mais, exposé au rayonnement de la flamme, le blouson ou l’anorak commence par sécher, puis, lorsqu’il est sec, il accumulent peu à peu la chaleur et sa température augmente. Brutalement il s’enflamme en entier. Viiiite ! il faut l’éteindre. Mais, comme il brûle de partout à la fois parce qu’il était chaud de partout, on ne réussit qu’à le faire tomber un peu plus loin, là où se trouvent des fougères sèches ou les affaires des autres, ou la tente ou alors un simple double toit… qui s’enflamme à son tour. J’ai connu ainsi un anorak qui s’est enflammé, qui a enflammé le double toit, qui a enflammé à son tour la tente et tout ce qui se trouvait dedans. La forêt aurait pris feu si les scouts n’étaient intervenus à temps.

Comment éviter cela ? Très simple, on ne place rein de combustible sans surveillance à moins de 2 mètres du feu : réserve de bois, sacs à dos, toiles, affaires qui sèchent…

Si l’on souhaite faire sécher ses affaires au plus près du feu, on les porte sur soi ou les tient à la main. Ainsi on ressent directement la chaleur du rayonnement sur ses mains ou sur ses tibias et on se recule s’il fait trop chaud.

La combustion lente du sol

Certains sols ne sont pas faits de minéraux. Au contraire, ils sont faits de matière organique végéale. Ainsi en est-il pour les tourbes, les terres de bruyère, certains humus. En fait ces sols sont des « carburants ». Rappelons ici une chose essentielle, pour qu’il y ait une combustion il faut :

  • Un carburant (ici la tourbe)
  • Un comburant (ici l’oxygène)
  • Et de la chaleur (ici, celle du feu)

Mais me direz-vous, où se trouve l’oxygène dans le sol ? En fait il s’en trouve dans les sols assimilés à de la tourbe car cette matière organique est en cours de compactage, il reste encore de l’air entre les débris qui ne sont pas encore complètement tassés (la houille, elle, est entièrement tassée et ne possède plus d’oxygène).
Lorsqu’on allume un feu dans un sol organique, la combustion s’y propage assez lentement mais très sûrement car, au fur et à mesure de la progression de la combustion, ce qui a été brûlé a été transformé en cendres qui laissent très bien passer l’air jusqu’au front de combustion.
Ceux qui ne seraient pas persuadés de la chose peuvent essayer d’allumer un feu sur une vielle souche. Le feu – ou plutôt la braise – s’y propage lentement mais sûrement et finit par brûler jusqu’à la base des racines car les trois éléments nécessaires à une combustion sont réunis : la chaleur, le bois, et l’oxygène déjà contenu en faible proportion dans le bois mais aussi celle qui arrive à travers la cendre des parties déjà brûlées. C’est ainsi qu’on parvient ainsi à se débarrasser facilement des souches encombrantes.
Dans un sol de tourbe il se passe exactement la même chose mais bien plus rapidement car :

  • La matière est bien moins dense que le bois
  • La matière contient davantage d’air
  • le foyer se trouve bien isolé thermiquement et la chaleur produite est 100% utile pour la suite d ela combustion

Alors comment faire ? C’est très simple, il s’agit d’une règle ABSOLUE : avant d’allumer un feu, il faut toujours creuser pour connaître la composition du sol. Si sous la petite couche d’humus on trouve des cailloux, du sable ou de la terre on peut y allumer un feu. Si l’on découvre de la tourbe ou de la terre de bruyère, il ne faut surtout pas y allumer de feu. Si on le faisait, un feu de sol se déclarerait plusieurs heures ou plusieurs jours après avoir éteint le feu. En fait, on aurait bien éteint le feu central mais pas l’anneau de combustion qui se serait déjà assez élargi et éloigné du foyer central.

Pour la seconde fois, on comprend qu’il faut une pelle bêche, cette fois pour sonder le sol.

Il nous faut aussi une pelle-bêche pour faire un beau trou et relever la terre en petit parapet autour du feu (on en profite alors pour sonder le sol). On placera avantageusement une rangée de pierres sur le parapet de terre pour bien délimiter le feu.

En résumé

PAS DE FEU :

  1. Si pas de pelle-bêche
  2. Dans les zones à risque : Fougères sèches, Pinèdes ou sapinières, Zones trop sèches
  3. Pendant les périodes à risque : Canicules, Vent violent (qui attise le feu et emporte les escarbilles au loin
  4. Dans les sols organiques. Pour le savoir, il faut creuser un peu. Si ce n’est pas de la roche, du caillou, du sable ou de la terre, alors on n’allume pas de feu.

Pour allumer un feu on prend les précautions suivantes :

  • Mettre la terre à nu sur 1,50 m de rayon.
  • Creuser un trou
  • Établir un parapet de terre et de cailloux.
  • Écarter ou couper les branches au-dessus du feu.
  • Écarter à distance de sécurité les éléments combustible (réserve de bois, vêtements, tentes…)

Lorsqu’on se couche, on ne laisse qu’un feu de braises raisonnable sans plus de flammes. Ou alors on établit des tours de veille.

Enfin, lorsqu’on quitte le bivouac (ou le lieu de camp) on éteint impérativement le feu le feu… MAIS ATTENTION, IL N’Y A QU’UNE SEULE TECHNIQUE ET LA VOICI :

Éteindre un feu

Arrêter de charger. Quelques temps avant l’extinction on ne charge plus le feu avec de grosse branches, on n’y met que des branches de plus en plus fines qui continueront à produire du feu mais qui serons très vite consumées (0).

Pourquoi on n’éteint pas un feu en y versant de l’eau ?

Lorsqu’on verse de l’eau sur un feu de braise, on parvient à atteindre quelques braises mais aussitôt l’eau qui est lourde se rue à la base du feu et soulève la cendre ainsi que les braises qui flottent alors. Sous le feu, l’eau est rapidement absorbée par la terre rendue très sèche… et le feu n’est pas éteint !

Retirer le bois qui n’est pas brûlé Lorsqu’il est temps d’éteindre le feu on commence par retirer le bois qui n’est pas brûlé. (1) Il s’agit de brandons qui portent des braises. On les éteint soigneusement en les trempant dans l’eau (2). Ensuite on va les disperser un à un sans les laisser ensemble dans des endroits où ils ne risqueraient pas d’enflammer quelque chose. Mieux encore, on les enterre un à un.

Piétiner Maintenant, il ne doit rester que des braises dans le feu. On les piétine avec application. Le piétinement demande peu d’énergie, il n’y a donc aucune raison de se montrer avare, il faut vraiment piétiner très sérieusement e ne pas hésiter à se relayer ne serait-ce que pour laisser refroidir les semelles des chaussures. Le piétinement supprime toute arrivée d’air. Lorsque de la poussière noire monte autour des chaussures, c’est bon, mais on continue encore un peu (3).

Recouvrir de terre. Lorsque le feu est entièrement rendu à l’état de poudre noire, à l’aide de la pelle-bêche, on y mélange environ la moitié de la terre du parapet (4). On piétine à nouveau. La terre sert à refroidir la poudre de charbon de bois et à isoler les particules entre-elles. Le tassement sert à chasser l’air interne et à empêcher l’air externe d’atteindre ce qui pourrait encore brûler (5). On peut mouiller le tout et alors, seulement maintenant l’eau est efficace. Elle refroidit une nouvelle fois le tout et rend la surface imperméable à l’air (5′). Cependant, si le piétinement est bien réalisé, l’eau n’est pas indispensable.
On recouvre le tout avec le reste de la terre du parapet et on aplani le sol toujours en le piétinant (on peut s’y mettre à plusieurs) (6).

Camoufler. Enfin, vraiment si on est certain d’avoir radicalement éteint le feu on peut opérer le camouflage de l’aire du feu en y replaçant les feuilles et l’humus qu’on avait écarté avant d’allumer le feu (7)

Remarque importante

Il est facile de comprendre pourquoi cette procédure d’extinction ne sert absolument à rien si un feu de tourbe est déjà en train de couver sous le sol et loin du foyer que l’on veut éteindre.

 

Chaque départ de feu est la conséquence directe d’une négligence ou d’une incompétence

Soyons donc rigoureux et comprenons ce que nous faisons

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